Carême, temps de libération

Publié le par Père Maurice Fourmond

Mercredi des Cendres

Le 13 février 2013

Homélie

 

Nous pensons que le Carême est un temps de pénitence. Ce n’est pas tout à fait juste. La pénitence n’est pas première, elle n’est que la conséquence d’un aspect bien plus important et fondamental du Carême qui est d’être un temps de libération.


L’Église nous propose ce temps afin d’acquérir un peu plus de liberté personnelle, cette liberté qui nous rend plus disponibles pour accueillir et dire «oui» à cette étonnante nouvelle, le Christ est vivant et nous appelle à la vie. Le Carême est donc un temps heureux, un temps de bonheur en raison de cette libération acquise avec la puissance de l’Esprit Saint, même si ce bonheur va demander de notre part un effort sur nous-mêmes.


Ce temps de libération suppose donc pour chacun de nous de prendre conscience de ce qui nous aliène ou du moins nous alourdit. Il  a une dizaine de jours, la lettre aux Hébreux invitait les croyants : «Débarrassons-nous, disait-elle, de tout ce qui nous alourdit»(12, 1). Ce qui nous alourdit ralentit notre marche quand cela ne nous fixe pas au sol, nous empêchant d’avancer. Ce temps de libération suppose donc un effort de lucidité et de vérité sur nous-mêmes.


Lorsque l’évangile de dimanche dernier, parlant de la vocation des premiers disciples, conclut : «Laissant tout, ils le suivirent», ce «laissant tout» n’est pas seulement leur barque ou leurs filets de pêche, mais bien au fond de leur vie ce qui pouvait les empêcher se suivre le Christ. Nous retrouvons ce «poids» qui empêche la liberté de suivre Jésus dans la parabole des invités à un grand repas: «Tous se mirent à s'excuser de la même façon. Le premier lui dit : 'J'ai acheté un champ, et je suis obligé d'aller le voir ; je t'en prie, excuse-moi.' Un autre dit : 'J'ai acheté cinq paires de boeufs, et je pars les essayer ; je t'en prie, excuse-moi.'» Lc 14, 18-19. Combien de fois nous ne répondons pas à l’appel de l’Esprit Saint parce que nous sommes encombrés par mille choses. Les unes sont bien sûr indispensables car elles sont nécessaires tout simplement pour vivre, mais d’autres sont soit superficielles soit constituent un poids réel que nous avons du mal à déposer tant il nous colle à la peau. Ce sont nos habitudes qu’on l’ose pas remettre en question, nos dépendances multiples qui mangent notre vie, nous empêchant de nous tourner vers des choses plus essentielles, tous ces liens plus ou moins épais qui nous entravent. Alors nous n’avons pas le temps ou le courage de répondre aux appels de nos frères, nous n’avons pas le temps ou le courage pour rencontrer ce Seigneur qui nous aime et nous lui disons : Excuse-moi !


Cet effort de vérité sur nous-mêmes peut être douloureux. Nous avons de nous-mêmes une image déformée soit parce que nous ne nous croyons pas capables de changer, soit à l’inverse que nous estimons légitimes nos manières superficielles de vivre. Certes celles-ci sont sans doute légitimes mais seulement pour une part et la vérité devrait nous inciter à considérer la part obscure qui entrave notre liberté, cette liberté pour donner et accueillir selon l’exemple du Christ Jésus.

 

L’imposition des cendres est certainement un acte d’humilité et l’expression de notre désir de conversion. Il peut être aussi la prise de conscience de ce qui nous empêche d’être des êtres vivants, de ce qui en nous est source sinon de mort du moins d’une perte de vie. Comme le dit un théologien, c’est un acte de révolte contre ce qui nous freine, un acte d’indignation devant l’ambiguïté de notre propre coeur.


Le mot «conversion» signifie «se tourner vers». Notre conversion commence par nous tourner vers cet Esprit de Vérité que Jésus a promis de nous donner : «Quand il viendra, lui l’Esprit de vérité, il vous guidera jusqu’à la vérité tout entière» Jn 16, 13.


Alors, ouvrons notre esprit et notre coeur à cet Esprit de Vérité, demandons-lui le courage pour nous libérer des liens qui nous empêchent  de trouver cette paix et cet accomplissement que Dieu souhaite pour chacun de nous : c’est la conversion que Dieu attend de nous et, ce temps de  Carême est pour cela un temps de grâce privilégié.


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