Le discrédit de l'Eglise

Publié le par Père Maurice Fourmond

Pourquoi, aujourd’hui, l’Église catholique est-elle mal perçue, critiquée voire rejetée ?

 

Certains médias catholiques n’avancent qu’une seule réponse : les valeurs évangéliques sont en contradiction avec les manières de vivre du monde et donc créent une opposition inévitable. Cette opposition est d’ailleurs annoncée par le Christ selon ce que nous rapportent les évangiles : “Si le monde vous hait, sachez qu’il m’a haï le premier. Si vous étiez du monde, le monde aimerait ce qui lui appartiendrait ; mais vous n’êtes pas du monde” Jn 15, 18-19.

 

C’est tout à fait vrai, mais ce n’est pas la seule raison de l’opposition à l’Église. En réduisant l’opposition à ce seul critère, notre Église s’enferme dans une problématique selon laquelle, elle possède la vérité, ses opposants sont dans l’erreur et vont à leur perte. Mais cette réduction empêche l’Église de s’interroger sur elle-même, elle ne se sent d’aucune manière questionnée sauf pour renforcer ses affirmations. Or il me semble que l’opposition à l’Église, si elle a sa source principale dans l’antagonisme entre les valeurs évangéliques et le monde, a d’autres motifs qui concerne ce que notre Église “donne à voir”.

 

Je vois deux raisons importantes qui suscitent des réactions négatives y compris chez des gens en principe bienveillants à la foi chrétienne. La première est le caractère absolu des règles de l’Église je veux dire un absolu qui ne tient pas compte de l’individu, du “cas particulier”. Ou encore, c’est l’affirmation juste de principes que nous croyons vrais, mais en oubliant que leur application n’est pas toujours “juste”. Si notre Église affirmait avec force, comme elle le fait, des principes qui éclairent et orientent nos vies, mais qu’en même temps elle reconnaisse qu’il peut y avoir des circonstances particulières où le principe ne s’applique pas au nom d’un principe supérieur qui est la conscience, le bien de telle personne individuelle, alors je pense que le regard sur notre Église serait modifié. Ce n’est nullement du relativisme, mais l’importance donnée à la situation réelle de telle ou telle personne ainsi d’ailleurs que Jésus n’a cessé de faire tout au long de sa vie. Pour donner un exemple, je pense à la réaction de Jésus devant l’indignation de certains lorsqu’un malade implorait sa guérison le jour du sabbat : “Est-il permis le jour du sabbat de faire le bien ou de faire le mal, de sauver une vie ou de la perdre ?” Lc 6, 9.

 

Une autre raison du discrédit de notre Église n’a rien à voir avec l’évangile, mais concerne ses institutions et son fonctionnement. Il faut reconnaître que l’organisation de notre Église est de l’ordre de l’histoire et qu’elle a été influencée par les modèles d’organisation de la société à telle ou telle époque de son histoire. Mais ces “modèles” n’ont pas les promesses de la vie éternelle et peuvent évoluer avec l’évolution de notre monde. Cela devrait interroger notre Église en permanence. Certes, le Concile Vatican II a ouvert des portes qui ont rempli d’espérance un grand nombre de personnes chrétiennes ou non. Accepter de poursuivre sérieusement cette recherche serait perçu par le monde comme une belle ouverture qui ne mettrait nullement en cause la source évangélique qui l’habite, au contraire. Notre Église montrerait ainsi un visage capable de se modifier pour le bien des croyants, montrant ainsi un visage de vérité aux hommes et femmes d’aujourd’hui.

 

Publié dans Essais

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